Bibliographie de Meaux

Le château de Meaux

L'ancien château des comtes de Champagne et de Brie

 
Le 22 novembre 2009 à 15h00 en l'Hôtel de Ville de Meaux, une conférence a présenté cette réalisation en image de synthèse (version 1). Elle sera suivie d'une visite du site (Télécharger l'affiche).

 

Nous avons réalisé une première reconstitution par images de synthèse de cet édifice démoli en 1890. Nous pensions simplement nous reposer sur les écrits existants. Antoine Carro (1) et Gaspard Morot (2) l’ont étudié partiellement  ; mais tous les auteurs qui leur succèdent se sont appropriés leur texte, soit en les paraphrasant sans rien apporter, soit en les copiant mot pour mot parfois même sans citer leurs sources ! Une exception toutefois : Jacques Hérissay (3) présente le château, non pas tel qu’il est en 1792 mais tel qu’il est vers 1880 ! Face à ce peu d’éléments, nous avons entrepris nos propres recherches (4). Nous exposons ici, un bref résumé de celles-ci et nous nous limiterons à l’histoire des bâtiments (5).

Le château de Meaux, dit des Comtes de Champagne et de Brie, occupait l’angle sud-ouest du castrum gallo-romain en bordure de Marne, l’aire couvrant grossièrement la place et l’îlot de l’actuel hôtel de ville..

 

Meaux est rattachée au comté de Champagne et de Brie au IXe siècle. Elle prend de l’importance à la fin du XIe s. Il est plausible qu’un bâtiment existe à Meaux dès cette époque bien que rien ne puisse l’affirmer. Les comtes jusqu’à Henri Le Libéral séjournent dans notre ville.

La première mention du château, ou plus exactement de sa chapelle, est une charte (6) de 1148 signée par Thibault II, suivie d’une autre en 1156 par son fils, Henri le Libéral, portant cette phrase : « Actum Meledis, in castell meo » (« Fait à Meaux dans mon château ») (7).

L’aire de l’édifice est délimité par un fossé qui date probablement de cette période et qu’aliment les eaux d’une déviation partielle du Brasset St-Rémy et de la Marne (8). On entre à l’est, côté Juiverie, par un pont-levis de bois remplacé ultérieurement un pont en pierre.

A l’intérieur, une cour dont le niveau est à moins de trois mètres au dessus du lit de la rivière, est ceinte, au sud, par le mur gallo-romain qui se prolonge perpendiculairement à l’ouest vers le nord.

 Là, les dépendances s’ouvrent sur la ville. La modeste chapelle Sainte-Marguerite en pierre de taille se détache au sud-est de la cour. Il n’existe pas de tour maîtresse (donjon) ; l’absence de ce symbole fort du pouvoir féodal n’était pas rare.

Château de Meaux - Côté ouest
Château de Meaux - Côté ouest

Quant au château proprement dit, il repose partiellement sur le rempart ouest – et peut-être reprenant une tour – du castrum gallo-romain. Il mesurait au sol environ 30 m (N-S) légèrement désaxé au tiers vers l’est, sur 12,40 m (E-O). Les quelques éléments conservés – colonnes, chapiteaux, carrelages –, les observations d’érudits locaux (Carro, Morot, Charpentier), les témoins de la démolition, confirment la présence d’un édifice roman du XIIe siècle malgré propos de Savard fils qui « a reconnu le faire architectonique du commencement du XIII è s. »(9)

Au rez-de-chaussée, deux salles basses d’inégales surfaces – la plus petite est située au Sud – communiquent avec le premier étage de même plan par au moins un escalier hélix situé dans la tour nord-ouest. Leurs voûtes d’arrêtes, peut-être renforcées par des arcs, reposent sur des corbeaux et les chapiteaux des trois colonnes alignées dans la grande salle et une centrale dans la petite ; leur sol est un pavage grossier. Le carrelage (10) est utilisé pour l’étage noble bien qu’un plancher l’ait remplacé depuis longtemps. Cet étage sous combles, réservé au comte, différencie l’espace public ou « grande salle », de l’espace privé chambre à parement ou à parer, comme l’on commence à le rencontrer dans les châteaux de l’époque. Son couvrement de type Renaissance est de poutres de bois. Un grand degré extérieur devait permettre  d’atteindre ce niveau.

Château de Meaux - Côté sud-ouest
Château de Meaux - Côté sud-ouest
(Image de synthèse - Version 1)

Un bâtiment perpendiculaire – qui, démoli, constitue l’espace du futur préau de la prisons des hommes – au nord du corps du château pose problèmes : lui est-il rattaché ou est-il totalement indépendant ? Quelle en est sa nature et sa destination ? Est-il contemporain ? Blondel (11) et Carro remarquent au XIX è s. une arcature de cinq baies romanes dans la massive muraille nord. Mais il ne s’agit pas des dépendances qui sont localisées  dans la prolongement, et sur lesquelles la prison des femmes est bâtie.

La chapelle, reconstruite – ou rénovée – probablement à l’époque de saint Louis, est sous le vocable de Saint-Louis et Sainte-Marguerite. Il s’agit très peut-être d’une dédicace en l’honneur de Marguerite de Blois, nièce d’Henri le Libéral, épouse d’Hugues d’Oisy, vicomte de Meaux, d’Otton Staufen, vicomte de Bourgogne et de Gautier d’Avesnes. La modeste chapelle est isolée du bâtiment principal. Janvier la représente en pierre de taille à un seul niveau coiffé d’un toit à deux pans surmonté d’un maigre clocheton, avec un portail et trois fenêtres latérales.

Château de Meaux - Côté sud-est
Château de Meaux - Côté sud-est
(Image de synthèse - Version 1)
Au moment du renforcement des fortifications de la ville au XV è s., le sol de la cour est rehaussé à huit mètres environ du niveau de la rivière, les murs d’enceinte à l’est sont reconstruits... L'entrée est désormais du côté nord – où les fossés disparaissent – par une pente raide dans prolongement sud de l'actuelle rue Martimprey. Après l’incendie de la Jacquerie (1358), il ne reste que les salles basses du château et les murs porteurs de la partie haute. Le plan ancien de celle-ci est repris pour accueillir le présidial au milieu du XVI è s. Le rez-de-chaussée qui sert dès lors de prison des hommes est comblée jusqu’au niveau supérieur des colonnes et compartimenté en cellules, couloir, cuisine. Quant à la prison des femmes, le bâtiment repose sur celui des dépendances disparues (ruines enfouies ?). La chapelle se situe maintenant à l’extérieur de l’enceinte ; le vitrier Gédéon Senelle, père du peintre local Jean Senelle, intervient en 1615 pour en réparer les grandes vitres. (12)

(Film en images de synthèse - Version 1 :
disponnible lorsque la version 2 sera réalisée)

Le château devenu présidial, puis tribunal à la Révolution, traverse les siècles, bon an mal an, avec de nombreuses menaces d'écroulements, de destructions et d'interventions de maintenance. Progressivement, les fossés s'envasent et s’assèchent. Ils sont vendus au XVIII è s. La tour sud-ouest s’écroule en 1797 alors que celle du nord-ouest loge les cachots au rez-de-chaussée et la salle d’attente des témoins au même niveau de la salle d’audience. Au début du XIX è s., l’escalier extérieur est couvert par un bâtiment qui sert d’infirmerie. Celle-ci est ensuite prolongée par la loge de gardien accolée à la prison des femmes. La ruelle du Tribunal devient escalier.

 

A partir des années 1850, les jours de l’édifice sont comptés. De multiples débats s’animent autour d’idées, de projets. Le Dr Charpentier (13) défend farouchement, dans les colonnes du journal L’écho de la Brie, l’idée d’installer un musée dans le château par la Société d’archéologie. Finalement, la sentence tombe lors de la séance du 10 novembre 1881 du Conseil municipal. Après les prison, on transfert le tribunal vers la place Henri IV. La démolition du château commence le 20 août 1888 et s’achève le 31 décembre 1890. Le Publicateur regrette : « C’est assurément ce qu’il y a de plus curieux à Meaux avec la cathédrale. » (14)

Ainsi, disparaissent les dernières traces visibles du château des comtes de Brie et de Champagne, laissant alors un terrain vague clos par des palissades (15).

Cependant, nos recherches permettent d'affirmer que les fondations du château marquent encore le sous-sol de la place de l’hôtel de ville !

Pour quand les fouilles ?

Patrice CROISY ©  Janv. 2002-2010 - D'après l'article paru dans le Bull. de la Société Littéraire et Historique de la Brie, n° 58, 2003. (v. note n° 5)

Notes

1 - Antoine-Étienne Carro, Notices sur le château de Meaux et sur le Cabinet de Bossuet, éd. Ledoyen, Paris, 1853 ; paru également en trois « feuilletons » dans le Journal de Seine-et-Marne du 10 au 24 mai 1851.

2 - Gaspard Morot, Histoire contemporaine de la ville de Meaux, éd. A. Le Blondel, 1893, 2ème édition, 3ème partie.

3- Jacques Hérissay, Les massacres de Meaux, 1935, éd. Librairie académique Perrin, p. 7-9.

4 - Médiathèque de Meaux (Manuscrits de Janvier, de Rochard), Archives municipales, Archives départementales, Archives nationales, Bibliothèque de France, dépouillement de la presse (Le Publicateur, l’Écho de la Brie, etc.).

5 - Nos recherches feront l’objet d’une publication détaillée , accompagnée  d'un DVD incluant une seconde reconstitution en images de synthèse, des documents iconographiques inédits et de la transcription de toutes nos sources.

6 - Cartulaire de l’église de Meaux, I-63, II-12. Médiathèque de Meaux.

7 - Aube Henri d’Arbois de Jubainville, Histoire des ducs et comtes de Champagne – Tome III, N° 38 du catalogue des actes d’Henri le Libéral.

8 - A propos de la déviation de la Marne : Georges Gassies, Histoire de Meaux. Tome 1 : Des origines à la fin du Moyen Age. Ch. IV, Société Littéraire et Historique de la Brie, 1982 ; Henri Touquoy, Note au sujet du cours de la Marne dans la traversée de la ville de Meaux, Bull. de la S.L.H.B., n° 21, 1964, pp. 5-10 ; Jean-Pierre Laporte, Topographie chrétienne de Meaux avant l'an mil, Revue de la d’Histoire et d’Art de la Brie et du Pays de Meaux, n° 46, 1995, pp. 12 et suivantes.

9 - Antoine Carro, Histoire de Meaux et du pays meldois, éd. A. Le Blondel, 1855, p. 82.

10 - Meaux médiéval et moderne, Association Meldoise d’Archéologie, 1992, p. 63-65

11 - Almanach de Seine-et-Marne, éd. Le Blondel, 1861, p. 76

12 - Arch. Dépt. 77 – 2ème suppl. Série E – CC. 17 – Meaux – 54 EDT /CC17.

13 - Dr Paul Charpentier, président de la Société d’archéologie, a écrit plusieurs articles à propos du château dans L’écho de la Brie, de 1884 à 1890.

14 - Chronique locale dans Le Publicateur, 26 sept. 1888.

15 - Les fouilles archéologiques de 1896-1898 qui précédent l’agrandissement de l'hôtel de ville ne concernent pas le château.

Liens

Le comté de Champagne et de Brie au Moyen Âge

     
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